Dr Jean-François Corty, directeur des missions France à Médecins du Monde, dresse un bilan alarmant de l’accès aux soins pour les plus démunis.
Mercredi 17 octobre se tient la Journée Internationale de refus de la misère. Quel bilan dressez-vous ?
Nous sommes en situation d’urgence sanitaire. Tous les indicateurs sont dans le rouge. Nous avons dressé un bilan annuel, qui soulève de nombreux problèmes. Nous constatons, de façon générale, une dégradation des conditions d’accès aux soins des plus démunis. La fréquentation des centres est en croissance constante et rapide. Se soigner est devenu un parcours du combattant pour les plus démunis. Plus de 98% d’entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté, et un tiers retarde ses soins. Un autre constat alarmant concerne les mineurs reçus dans nos centres : leur nombre a augmenté de 48 % depuis 2008. La loi leur garantit pourtant en principe un accès inconditionnel au système de soins.
La crise a t-elle empiré les choses ?
La crise économique impacte la précarité et augmente les besoins. Il y a d’ailleurs ce que l’on appelle les « nouveaux exclus », qui sont des citoyens Français, en situation de grande précarité. Trop riches pour obtenir la CMU (couverture de maladie universelle), et trop pauvres pour avoir une mutuelle. Le système de santé actuel est de moins en moins solidaire. Il y a de moins en moins de remboursements donc le reste à charge est de plus en plus conséquent. Cela a indéniablement un impact sur les dispositifs de santé publique.
Comment changer les choses ?
Il faut plus de solidarité dans nos politiques publiques. Lors de la conférence de lutte contre la pauvreté et les exclusions du 10 et 11 décembre, le gouvernement doit de toute urgence prendre ses responsabilités et engager de façon concrète des politiques sanitaires et sociales en faveur des plus démunis. Médecins du Monde proposera plusieurs choses, dont la révision des politiques restrictives à l’encontre des migrants pour les protéger et favoriser leur intégration. Nous demandons également la création des salles de shoot qui permettraient de contrôler l’épidémie d’hépatite C.