Médecins du monde alerte sur l’état de santé des pauvres en France

Médecins du Monde s’active aux quatre coins de la planète pour apporter des soins aux pauvres de soixante pays. Mais ce jeudi, à la veille de la journée internationale du refus de la misère, l’ONG française veut alerter sur la situation de grande précarité dans l’Hexagone. Selon le directeur des missions France, Jean-François Corty, «les inégalités de santé restent fortes» dans le pays des Droits de l’Homme et la situation ne fait qu’empirer Autre préoccupation grandissante des bénévoles: les préjugés sur les pauvres sont féroces en France et n’aident pas la prise en charge.
En 2013, l’ONG a reçu dans ses 20 centres d’accueil, de soins et d’orientation (Caso), 29 960 personnes exclues du système de santé français. Parmi les patients pris en charge, Thierry Brigaud, le président de Médecins du Monde, s’inquiète d’une «hausse du nombre de mineurs isolés et de femmes enceintes laissées à l’abandon pendant leur grossesse». Majoritairement, les patients sont toutefois des hommes jeunes (33 ans en moyenne), originaires d’Afrique subsaharienne, du Maghreb et de l’Union européenne. 97% d’entre eux étaient sous le seuil de pauvreté, 27% sans aucune ressource.

Des patients «affamés»

«Nos patients ont faim», déplore ainsi Jean-François Corty. Selon une étude menée dans sept Caso en 2014, 80% des ménages soignés sont en «insécurité alimentaire pour raison financière». Près de la moitié des adultes et plus de 20% des jeunes n’ont pas mangé au moins une journée entière dans le mois. Et «un tiers des patients présentent une pathologie en lien avec une alimentation défavorable».

Sans surprise, près de 90% des patients n’ont aucune couverture maladie. Le plus étonnant est que les trois quarts pourraient pourtant en bénéficier, notamment via l’Aide médicale d’Etat (AME, qui prend en charge les soins des étrangers sans papier et sans ressource). Mais Médecins du Monde constate en permanence une méconnaissance de leurs droits.

Le logement est un autre problème récurrent, qui entraîne également des soucis de santé. Hawa, seule et sans logement, dort chez des tiers quand elle le peut, parfois «dans un garage» ou «dehors». En ce moment, «j’appelle le 115 tous les jours», explique-t-elle, sans arriver à être prise en charge. Hawa vient d’apprendre qu’elle est enceinte de cinq semaines, conséquence d’un soir où pour avoir un toit, elle a dû accepter les avances de l’homme qui l’hébergeait… Seulement 8% des patients ont un logement personnel.

97% des Français ont au moins un préjugé sur les pauvresJean-François Corty l’assure, «il n’y a pas d’arrivée massive de migrants pour raison médicale». Le directeur des missions France à Médecins du Monde dénonce «les attaques répétées contre l’Aide médicale d’Etat (AME)». Selon lui, la hausse des coûts de ce dispositif est liée à «une sous-budgétisation au départ» plus qu’à d’éventuels abus. Il déplore ainsi que l’on cherche à «opposer les précaires entre eux».

Selon une enquête BeBetter&Co et à Opinionway pour ATD Quart Monde, 97% des Français ont au moins un préjugé sur les pauvres. Sept Français sur dix pensent par exemple qu’il est facile d’obtenir des aides «alors même que le pourcentage de personnes qui ne demandent pas les aides auxquelles elles ont droit (de 29 à 70% de non recours selon les droits) conduit pourtant à penser le contraire».

Par ailleurs, 65 % pensent que la lutte contre la pauvreté coûte cher aux classes moyennes. Or, selon ATD Quart Monde, «les classes moyennes inférieures reçoivent, en retour des taxes, impôts et cotisations qu’ils paient (43% de leurs revenus), l’équivalent en aides,
assurance maladie et retraite (42%)».

Voir l’exposition interactive de Médecins du monde

http://www.leparisien.fr/societe/medecins-du-monde-alerte-sur-l-etat-de-sante-des-pauvres-en-france-16-10-2014-4217605.php

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