Appel à rétablir les amendes aux clients de la prostitution

par Guillaume Frouin

NANTES (Reuters) – La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a appelé jeudi les députés à rétablir les amendes pour les clients de la prostitution, à la veille du retour à l’Assemblée de sa loi contre « le système prostitutionnel ».

Cette disposition avait été supprimée fin mars par le Sénat, où la droite est majoritaire, qui avait en revanche refusé d’abroger le délit de « racolage » pour les prostitué(e)s.

« Le Sénat a été assez indigne dans la manière de traiter le sujet, en renversant la situation : des femmes prostituées qui doivent être protégées, il en a fait des coupables, alors que ce sont des victimes », a dit Marisol Touraine en marge d’une rencontre à Nantes avec plusieurs associations d’aide aux personnes prostituées.

« Le délit de racolage a amené les femmes à se cacher, et il a été beaucoup plus difficile, pour les associations, pour les médecins et les structures sociales, d’entrer en contact avec elles », a-t-elle ajouté. « Or, pour accompagner les femmes qui se prostituent, pour garantir leur état de santé, on a besoin d’aller vers elles. Le délit de racolage, c’est l’assurance du repli et qu’on ne les verra plus. »

 

LES ASSOCIATIONS DIVISÉES

Marisol Touraine a aussi estimé que la pénalisation des clients était une « disposition importante » du projet de loi, mais a rappelé qu’elle s’inscrivait « dans un ensemble de mesures, cohérentes et globales, qui visent à renforcer la place des associations ».

« Ce sont aussi aux hommes de réfléchir à ce qu’ils font, à la manière dont ils se comportent. »

Les sanctions pénales à l’encontre des clients divisent toutefois les associations d’aide aux prostitué(e)s, certaines redoutant qu’elles ne poussent ces dernières à la clandestinité.

« Je ne pense pas que pénaliser les clients soit une bonne idée : si je n’avais pas eu de clients, je n’aurais pas pu manger, ni eu de quoi payer mon loyer », a dit à Reuters Teodora Niculescu, ancienne prostituée roumaine de 27 ans, qui travaille désormais dans les équipes de prévention de Médecins du monde.

Le Mouvement du Nid, lui, appelle en revanche à « mettre définitivement fin à (…) à l’impunité des clients », a dit son secrétaire général, Grégoire Théry, dans un communiqué.

Teodora Niculescu, qui a été verbalisée plusieurs fois pour « racolage » mais n’a jamais reçu d’amendes, a aussi souligné qu’il serait « très difficile » de sanctionner les clients : « Pour cela, il faudrait les prendre en flagrant délit de paiement. Ce sera pratiquement impossible. »

Elle suggère plutôt une levée des restrictions au travail des étrangers. « Quand je suis arrivée en France, je n’avais pas le droit de travailler. Si j’ai commencé à travailler dans la rue, c’était d’abord pour manger », a-t-elle dit.

 

 

(Edité par Gregory Blachier)

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